Pour son exposition inaugurale, le Drawing Hall présente une sélection d’oeuvres de la collection de Christine Phal et Carine Tissot, duo mère / fille fondateur de la Drawing Society. Émilie Bouvard, conservatrice à l’Institut Giacometti (Paris 14e), s’est intéressée aux artistes que la mère et la fille ont en commun dans leurs collections respectives. L’accrochage s’articule autour de la couleur et du noir et blanc, et laisse surtout apparaître leur passion commune pour le dessin contemporain à l’origine de toute l’aventure Drawing.
Christine Phal et Carine Tissot sont les entrepreneuses qui font vivre Drawing Now Art Fair, le salon du dessin contemporain parisien depuis des années. Elles sont celles qui ont conçu la Drawing House. Elles sont aussi mère et fille.
Il est rare de voir de tels duos travailler ensemble – ou pas ? Le goût de l’art, la passion ici pour le dessin est transmise, partagée, mais aussi discutée, de Drawing Now Art Fair au Drawing Hotel et à son Lab rue de Richelieu, à la Drawing House. Ces créations – car on peut ici parler de « création » - ont profondément modifié le paysage parisien depuis plusieurs années, confirmant le dessin comme medium autonome et d’une incroyable inventivité pour la création contemporaine.
Leurs collections sont différentes. Elles n’ont pas non plus tout à fait la même temporalité. Dans celle de Christine Phal, le dessin tend à se réfléchir comme pratique, à se mettre en abyme, dans une recherche de la variété des styles et des supports, aux limites du medium. Celle de Carine Tissot fait une large place aux dessinatrices, et à un langage affirmé, punchy, à l’humour aussi. Pour autant, elles se retrouvent autour de certains artistes, rassemblés ici ; pour intervenir dans la Drawing House, elles ont choisi ensemble Mathieu Dufois, Alexandre et Florentine Lamarche-Ovize, Daniel Otero Torres, Lucie Picandet et Karine Rougier (auxquels s’ajoutent Marion Charlet et Jeanne Susplugas non exposées ici).
Confronter ces deux collections, les mettre en miroir, fait ressortir deux ensembles. Le premier est graphique, matiériste, en noir et blanc, c’est le dessin qui pousse le « trait », le « tracé » à sa limite, de Philippe Cognée à Jérôme Zonder. Le second regarde du côté de la peinture : coloré, narratif, aquarellé, il appelle au plaisir des yeux et de l’esprit par la couleur, de Willys Kezi à Pauline Fondevilla. Ces deux pratiques du dessin se rejoignent dans les effets d’aplat et dans une dimension haptique qui réjouit passionnément le regard et le corps. Enfin, le dessin peut déborder vers le volume, le multiple et l’édition, témoignant de la dimension laboratoire de ces deux collections.